MARDON Louis, Henri

Né le 21 janvier 1901 à Paris (IXe arr.), mort le 22 novembre 1977 à Ria-Sirach (Pyrénées-Orientales) ; instituteur en Haute-Loire ; résistant dans le Languedoc ; directeur de La Voix de la patrie. Communiste

 

 
 

Montpellier, 1951. Le comité de Libération du quartier de la maternité se recueille. Au premier plan, l’abbé Parguel ; Louis Mardon, le premier à partir de la droite, les bras croisés (Collection particulière Rose Blin-Mioch).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Fils de Louis, Gustave Mardon, marchand de vins et de Julie Duffourg, Louis Mardon, se maria une première fois avec  Marie, Mélanie Savin. Après avoir divorcé, il se maria avec une originaire des Pyrénées-Orientales Cécilia Trasfi. Instituteur, secrétaire de la Fédération socialiste SFIO de la Haute-Loire, candidat aux élections législatives de 1932 dans la circonscription du Puy, obtint 383 voix au premier tour (18 708 inscrits) et 14 voix au deuxième tour. Il collaborait au Rappel de la Haute-Loire. 
Déplacé d’office en septembre 1940 à Abeilhan (Hérault) par le gouvernement de Vichy, il s’y maria le 15 juin 1942. Il rejoignit la Résistance et fut un des fondateurs du Front national dans les départements de l’Hérault et de l’Aude. Il fut membre du comité directeur inter-régional du Front national qui avait compétence sur l’Aude et l’Hérault. Présidé d’abord par Henri Pupponi* puis par ,Alphonse Denis, ce comité compta parmi ses membres Antonin Balmes médecin , Paul Marres* professeur de géographie à l’université de Montpellier et le pasteur Cadier professeur à la faculté de théologie protestante de Montpellier. Il dirigea le journal clandestin du mouvement, La Voix de la patrie dont il fut à l’origine. Le journal devint quotidien à la Libération pour le Languedoc, imprimé sur les presses du Petit Méridional qui avait continué à paraître pendant l’Occupation. Il le dirigea jusqu’à sa disparition en février 1953.

En 1949, Louis Mardon fut mis en cause, en tant que directeur de publication, pour « l’affaire de l’affiche du peintre communiste André Fougeron* ». Le procureur général de la cour d’appel de Lyon l’avait appelé « l’affaire de la bombe atomique » . L’affiche incriminée représentait un enfant gisant au sol dans une ville détruite par une bombe atomique. La diffusion de cette affiche dans les journaux communistes, son apposition sur les murs, entrainera le réquisitoire du peintre ainsi que l’ouverture de deux cent informations contre X, sous le motif de provocation à participer à une entreprise de démoralisation de l’armée ou de la nation ayant pour but de nuire à la défense nationale. Louis Mardon sera inculpé pour avoir publié une reproduction de cette affiche. Le tribunal de Montpellier le relaxera par jugement du 31 mai 1949, au motif qu’il avait « poursuivi au but de la propagande pour la paix sans qu’il soit apporté au tribunal aucune justification de l’existence d’une entreprise de démoralisation de l’armée ou de la nation à la participation de laquelle l’inculpé aurait provoqué autrui ». Ce jugement sera important car il reconnait d’une part, qu’une action pour la paix n’est pas nuisible à la défense nationale et d’autre part il ne permet plus de réprimer des actes individuels qui ne seraient pas rattachés à une action collective. La cour d’appel de Montpellier confirmera cette décision par un arrêt du 27 juillet 1949. L’arrêt « Mardon » fera donc jurisprudence et il entrainera la multiplication de décisions de relaxe. Mais surtout, ce qu’en retiendront les juristes, c’est qu’il ouvrira désormais une réflexion sur la définition à apporter aux crimes d’atteintes à la sureté de l’Etat et sur la manière dont le gouvernement français va pouvoir poursuivre sa politique répressive.

Malgré ce, il fut plusieurs fois inquiété. Ainsi début juillet 1950, il fut inculpé pour diffusion de « fausses nouvelles ». De quoi s’agissait-il ? Son journal avait rapporté, le 26 mars 1950, les propos de travailleurs présents sur un piquet de grève à l’entrée du port de Sète, sous le titre « les soldats du 81ème R.I ont chanté l’Internationale ». Alors qu’ils étaient présents sur le piquet de grève, le 25 mars 1950 entre 7 h et 8 h du matin, ils avaient été surpris d’entendre le chant des ouvriers entonné par des militaires, entassés dans des camions. Le convoi venait de la route de Montpellier et se dirigeait vers la caserne Vauban à Sète. Le 17 juillet cinq témoins furent entendus, ils confirmèrent avoir entendu le chant, lors du passage des camions. Un Lieutenant fut également entendu, il déclara qu’aucun  des gradés du convoi ne lui avait rapporté de tels incidents. Personne n’avait entendu les militaires chanter. Un gardien de la Paix, présent dans des locaux à proximité du passage incriminé (Pont de la Victoire) déclara de son côté n’avoir rien entendu. Les documents manquent pour connaitre la conclusion donnée à cette « fausse nouvelle ».

Il militait au Parti Communiste Français à Montpellier. Il faisait partie du Comité de Libération du quartier de la maternité à Montpellier, présidé par l’abbé Paul Parguel (prêtre, résistant, déporté) avec Philomen Mioch*, résistant communiste et Carmen Antonio-Mioch, agent de liaison également communiste.

Le 27 août 1974, il signa en tant qu’ « ancien directeur de la Voix de la Patrie » un article dans le journal « La Marseillaise ». Sous le titre « Trente ans déjà ! le premier tirage de « la vois de la patrie » »  il retraçait un bref historique de ce journal pour conclure sur la fin de ce titre «…jusqu’au jour où elle succomba, pavillon haut, sous le poids des dizaines de procès et des millions d’amendes infligées sur l’ordre des gouvernants qui « frappaient à la caisse. La lutte était par trop inégale. Et le 13 février 1953 « La Patrie », fidèle à ses origines comme à son idéal, repassait le flambeau à « La Marseillaise », au service de la même cause, au nom des mêmes principes, en vertu des mêmes objectifs. C’est le combat des mêmes contre les mêmes qui continue ».

Ses obsèques furent civiles. Présidées par Raymond Fournier* qui prononça son éloge funèbre, elles furent l’occasion d’une imposante manifestation de résistants des Pyrénées-Orientales et de l’Hérault, parmi lesquels on relevait la présence de Jean Font*, président des CVR de Prades, la grande localité proche de Ria-Sirach.  Le PCF ne fut représenté que par un membre du bureau fédéral des Pyrénées-Orientales, Roland Monells. Louis Mardon était décoré de la Croix de guerre avec étoile d’argent. Il avait été cité à l’ordre de la division.

 

SOURCES : Arch. com. Ria-Sirach, état-civil. —L’Auvergne socialiste, 25 avril 1931. — G. Lachapelle, Les Élections législatives de 1932, op. cit.. —Lucien Maury, La Résistance audoise, Carcassonne, comité d’Histoire de la Résistance du département de l’Aude, tome I, 1980, 541 p. [p. 111]. —Le Travailleur catalan, 7 décembre 1977. — Presse. — DBMOF, notice non signée. — Sites Internet. — Notes d’André Balent et de Jacques Girault. – Archives départementales de l’Hérault, 1739 W 37 – Congrès de l’Association Française des Sciences Politiques 2009 http:/www.congresafsp2009.fr/sectionsthematiques/st10codaccioni.pdf


André Balent - Jacques BLIN